Quand les premiers hommes arrivèrent à Uluru et à Kata Tjuta (Monts Olgas), ils furent sans doute saisis par la beauté animale de ces blocs monolithes entre 1060 et 863 m de hauteur.
Leur démesure impressionne dans un océan de dunes à perte de vue.
Le grain des surfaces lissées comme la peau d'un lézard donne envie d'y poser la main.
Les cavités comme des yeux, des corps enchevêtrés, des traces d'un bestiaire oublié convoquent l'imagination.
A l'instar de toute les sociétés humaines, ils trouvèrent un sens, en y inscrivant les prémisses de leurs rituels et des lois du Tjukurpa, au Temps du Rêve.
Ces blocs forment un tout cohérent dans leur culture, à la fois habitat saisonnier, espace de cérémonie, grimoire scarifié dans la pierre, peint dans ses entrailles, lieu d'aboutissement et de commencement du monde.
Je tente d'oublier les hordes de touristes de la planète toute entière. Les bus qui les amènent sont blindés à l'avant pour projeter au loin les animaux qui pourraient s'y fracasser.
Les pancartes des gardiens ancestraux Aborigènes invitent à ne pas monter sur Uluru. Mais certains n'y résistent pas.
Mais pourquoi donc l'état Australien n'interdit tout simplement pas cette ascension ? Ailleurs il faut des permis pour accéder aux territoires Aborigènes, et des pénalités de plus de 1000 dollars sont perçues en cas de violation.
Il est bien loin le temps où des blancs ont planté un drapeau en haut d'Uluru comme sur la lune !
Les presque 400 mètres de dénivelé provoquent chaque année des accidents et des arrêts cardiaques, autant d'évènements tragiques pas neutres pour les Aborigènes.
J'appréhendais cette rencontre après la solitude de l'outback. Néanmoins l'intensité des lieux surpasse tous les atermoiements. Les marches de 8 km autour de ces deux lieux classés au patrimoine mondiale de l'Unesco méritent le détour pour saisir le privilège d'être là au présent.
En dépit des températures bien fraîches la nuit, je ne me lasse pas des bivouacs à la belle étoile. Un sentiment de liberté, de grande légèreté. Comme le matin, ne jamais savoir où l'on passera la nuit. Il y a presque une once de nomadisme (aléatoire) dans ces pérégrinations.
Chaque soir le rituel est immuable. Trouver un lieu inspirant et rassurant pour la nuit, en pleine nature et sans artefacts de notre monde.
Au choix selon l'endroit, creuser le sol pour le feu, ou former un cercle de pierre. Puis ramassage du bois sans hache, avant que la nuit ne tombe.
Le feu de bois est bienvenu en cet hiver et réchauffe le côté face du corps, pendant que le dos encaisse un vent léger à 5•c. Je rêve d'un grille pain pour équilibrer l'ensemble.
Il n'y a pas de connexion aujourd'hui. Ce message partira un autre jour.
Je remonte toujours vers le nord en direction de Kings Canyon, avant de retourner dans une communauté Aborigène.