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Papunya Tula Artists

Focus sur l'artiste Mary Napangardi

© Photo : with the courtesy of Papunya Tula artists

© Photo : with the courtesy of Papunya Tula artists

Je vous invite dans l’univers artistique d’une grande dame d’Australie, Mary Napangati, née en 1955 dans une zone éloignée du centre de l'Australie, à Wilkinkarra près du Lake Mackay, une immense mer intérieure dont la croute salée brille au soleil.

Dans cette photo prise à Alice Spings par les équipes de Papnuya Tula, résonne avec fierté l'identité Aborigène de l'artiste Mary Napangati devant une de ses peintures, et transparaît ce monde ultra connecté où chaque évènement de la planète touche y compris au delà des océans. Sur ses toiles s'accomplissent des performances.

À travers l’espace et le temps, les mains jouent les médiatrices et tissent les histoires du Temps du Rêve. Les points conjugués presque à l’infini, perlés et enchainés, dynamiques en accéléré, invitent dans le territoire, soulignent le mouvement de la marche, accentuent les faisceaux de lumière et révèlent les lieux de paix où se trouvent les sources d'eau.

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

Quand elle réalise une œuvre, bien souvent un sourire contemplatif se dessine sur son visage.

L’instant est solennel. elle ne peint pas, elle célèbre ces lieux de vie sacrés près du lac Mackay.

L’instant est mémorable, elle ne réalise pas, elle transmet l'histoire et la sublime à la fois.

Ses œuvres évoquent le site important du trou d'eau dans la roche à Tjutalpi au cœur du désert central. Aux temps de la Création, un groupe d'hommes et de femmes se rendaient sur ce site. À Tjutalpi, ils interprétaient les danses et les chants associés à la région et à ce lieu emblématique. Au cours de leurs voyages vers cet endroit, les hommes et les femmes ont cueilli une variété d'aliments de bush, y compris des tomates (pura) ou de Solanum chippendalei, et du kampurarrpa ou des raisins secs du désert (Solanum central). Ils ont également ramassé du bois pour la fabrication des wanas (bâtons à creuser des femmes). Les cercles concentriques dans l'œuvre représentent les étapes et épanchements d'eau salutaires dans le désert, tandis que les lignes vibrantes représentent les talis (crêtes des dunes de sable).

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

A l’affut des détails, on est invité dans le geste sensible et alerte du peintre, dans la vibration de son âme et de sa mémoire portée sur la toile. La famille de Mary vivait dans les environs de Lappi Lappi, située vers la région nord du lac Mackay, jusqu'à ce qu'ils viennent s'installer dans la station d'élevage du bétail du mont Doreen à l'ouest de Yuendumu. À cette époque, Mary avait environ dix ans. Sa famille travaillait se mit à travailler là et les enfants étaient conduits en camion pour aller à l'école à Yuendumu.

Lorsque le propriétaire de la station est décédé, la famille a déménagé à Yuendumu, où elle s'est mariée, puis a déménagé plus à l'ouest à Nyirrpi et a donné naissance à deux garçons. Après le décès de son mari, Mary s'est remariée avec le célèbre artiste de Papunya Tula Ronnie Tjampitjinpa et a déménagé à Kintore, où elle vit et peint maintenant avec une individualité particulière. Découvrez les 3 œuvres magnifiques de Mary Napangati, actuellement exposées à Bruxelles.

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

© Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artist Mary Napangardi & Papunya Tula.

Focus sur une œuvre d'art Aborigène de l'artiste Yinarupa Nangala

Titre : Rockhole of Mukula & Marapinti (ancestral Dreaming time stories). Artiste : Yinarupa Nangala. Format : 183 x 153 cm © Photo : Aboriginal SIgnature • Estrangin gallery with the courtesy of the artist & Papunya Tula

Titre : Rockhole of Mukula & Marapinti (ancestral Dreaming time stories). Artiste : Yinarupa Nangala. Format : 183 x 153 cm © Photo : Aboriginal SIgnature • Estrangin gallery with the courtesy of the artist & Papunya Tula

Les œuvres de Yinarupa Nangala rejoignent comme ici la grande tradition de Papunya Tula avec un geste précis, délicat, offrant une vision toute nuancée du territoire.

Dans cette œuvre magistrale rayonnent plusieurs dimensions autour de lieux sacrés emblématiques pour son peuple. Nous nous retrouvons ainsi face à une carte empirique et spirituelle à la fois, avec des trous d'eau qui transparaissent par endroits.

L'artiste évoque les cheminements nomades millénaires à travers le territoire, vers les lieux de Mukula et de Marrapinti. Ce dernier endroit est important pour les Aborigènes de son clan. Ils y réalisent des os insérés dans le "web" du nez lors des cérémonies rituelles d'initiation des jeunes adolescents et adolescentes.
L'artiste traite ainsi de la fabrication de ces objets mais également de leur usage ultérieur lors des cérémonies. Différents espaces temps se répondent ainsi dans l'œuvre.

Différentes constructions élaborées soulignent des cérémonies féminines, mais également des collectes de nourritures pour subsister dans ce désert semi-aride.
Bien plus qu'une peinture cette œuvre est également un témoignage des connaissances transmises à travers les générations.

Le thème "Marapinti", à la fois lieu de l'élaboration des os mis dans le nez, mais également des cérémonies associés, est traité au sein de l'exposition "Aux sources de l'art", à travers 8 peintures réalisées par les artistes femmes : Yalti Napandati, Nanyuma Napangati, Monica Napaltjarri.

Plus d'info sur cette œuvre de Yinarupa Nangala.

Intemporelle modernité - Art Aborigène d'Australie - Papunya Tula

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Il y a deux ans, j’arpentais les allées des collections du South Australian Museum à Adelaïde. Jamais je n’avais autant perçu la richesse et la diversité des objets Aborigènes.
 
Des paniers finement tressés du XIXe siècle y ressemblent à des bicornes napoléoniens.
Des casiers en fibre végétale battent en brèche l’idée d’un pur nomadisme. Ils servaient à piéger les poissons dans les rivières mais également dans des enclos dédiés à la pisciculture sur les côtes Australiennes...

Un peu plus loin, un boomerang tout érodé et blanchi, flirte avec les millénaires. Daté au carbone 14, il nous regarde du haut de ses 11 000 ans.

A un autre étage du musée, un polymère naturel inventé par les Aborigènes chamboule la pendule du temps. Le chauffage des buissons de Spinifex permit très tôt d’obtenir une colle, presque comme une matière plastifiée permettant d’assembler, d’entourer, d’emmancher des objets.


Vibration de signes millénaires

D’une vitrine à l’autre, je m’étonnais face aux symboles peints ou scarifiés sur les objets des siècles passés. Avec une surprenante modernité, des zig-zags complexes ornaient des boucliers en bois. Un peu plus loin des nacres gravées offraient des entrelacs, courbes et déliés, aux effets vibratoires et cinétiques renforcés par le miroitement de la matière.
 
Des panneaux en bois gravés anciens, appelés - messages boards -, ouvraient une autre fenêtre sur un langage ancestral. Au détour des signes, apparaissaient les lignes gravées des chemins du Temps du Rêve, les trous d’eau relevés par des cercles concentriques, les formes en U comme autant de personnages incarnés, les traces d’oiseaux ou d’animaux laissées par les grands ancêtres…
 
Ce vocabulaire pictural n’a jamais été oublié. Il retrouvera même une expression singulière quelques siècles plus tard dans la peinture Aborigène. Elle se révèlera à l’occident en 1971 en plein cœur du désert à Papunya.
 

Emouvante modernité

 
Aujourd’hui, avec la même fertilité qu’au départ, les Aborigènes convoquent au présent sur les toiles, la plus ancienne tradition artistique continue au monde.
Les retrouver aujourd’hui à Bruxelles, dans le cadre de notre nouvelle exposition « Aux sources de l’art » (*) avec les artistes de Papunya Tula est un moment privilégié et assez unique en Europe.
 
Les artistes actuels, sont les descendants des concepteurs de ces objets anciens. Ils sont même les gardiens de ces symboles et les partagent à travers leurs peintures. Ils jouent avec les motifs, les extrapolent, pour restituer toute la densité et la spiritualité de leurs mythes ancestraux.
Chaque peintre dispose de droits claniques hérités des anciens. Il peut ainsi transposer ces motifs peints hier sur leurs corps ou sur le sol, en utilisant de nouveaux supports comme les toiles de lin, et continuer ainsi de transmettre à son tour la mémoire de leur peuple.
 
Je me souviens d’une artiste Aborigène que je voyais chanter en peignant, puis danser une fois la toile terminée. Elle honorait les lieux et les ancêtres évoqués dans sa peinture.
En observant les formes presque sinusoïdales de son œuvre, il y avait comme une invitation à voir au-delà de la toile, à y lire comme une partition. Les ondulations de son pinceau, les effets de profondeurs, les scintillements cinétiques, portaient en eux un sens caché, une vision propre aux initiés, amplifiée et bercée par un univers musical millénaire. Chapeau bas !